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La motivation en classe

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La motivation en classe

Voici le troisième et dernier volet des cours introductifs sur la motivation. Il concerne essentiellement les enseignants et formateurs, mais les parents d’élèves y trouveront de l’intérêt, sans compter tous ceux qui se posent des questions sur la nature humaine. La motivation aura sur le site neuropedagogie.com son onglet propre avec des cours nettement plus approfondis… en temps voulu !

Prérequis :

  1. Théories générales sur la motivation
  2. Développer et entretenir la motivation

 

 

1. Connaître ses élèves

 

La motivation demeure avant tout liée à la personnalité, à l’éthique et à l’interprétation de chacun. Nous n’analysons pas une situation de la même façon, n’en retirons pas les mêmes enseignements, ne nous transformons pas à son contact de la même manière. Voilà pourquoi il est important de connaître ses élèves. Les premières heures du début d’année devraient être dévolues à cette tâche.

On trouvera ci-dessous quelques questions (non exhaustives) que l’on peut poser aux élèves (à l’oral ou à l’écrit) pour connaître ce qui les motive.  Nous proposerons dans quelques mois un questionnaire plus élaboré ainsi qu’un guide pour analyser les réponses.

  • quelles sont les activités qu’ils pratiquent (sport, art, jeux, etc.) ? Qu’est-ce qui leur plaît dans ces activités ? Qu’y recherchent-ils ?
  • quelle profession souhaitent-ils exercer ? Pourquoi ?
  • comment choisissent-ils leurs amis (sur quels critères) ?
  • comment font-ils leurs devoirs ? Le plus tôt possible ? Au dernier moment ? En plusieurs fois ? Si c’est le cas, combien de fois s’interrompent-ils ? Pour quelles raisons ? Cela concerne-t-il toutes les matières ?
  • Sont-ils capables de maintenir durablement des efforts ? Pour quelle activité (pas uniquement scolaire) ? Abandonnent-ils assez tôt face à la difficulté ? Pourquoi ?
  • croient-ils en leurs capacités ou compétences ? Dans quels domaines (pas uniquement scolaire) se croient-ils capables de réussir ou d’échouer ? Pour quelles raisons ?
  • Agissent-ils uniquement quand ils perçoivent de l’intérêt, utilité et importance, ou même en dehors de cela ?
  • Quel est le degré d’affectivité qu’ils attribuent à la tâche à accomplir ou aux personnes qui exercent avec eux cette tâche ?
  • Croient-ils en une destinée ou au contraire au libre-arbitre ?

 

 

2. Ce que recherchent les élèves (primaire, collège et lycée) à l’école

 

Plus les élèves progressent dans leur scolarité, moins ils sont motivés pour apprendre à l’école. Et si pour l’enseignant l’école est un lieu où l’on transmet le savoir, l’élève nourrit d’autres considérations.

Il est alors utile de connaître la théorie de Raths calquée sur la pyramide des besoins de Maslow. Bien qu’en raison des avancées récentes de la recherche, celles-ci ne soient plus aussi catégoriques, elles demeurent malgré tout globalement valides. Il est difficile d’être motivé à étudier si certains besoins et conditions ne sont pas remplis.

Avant tout, les élèves recherchent à assurer les besoins physiologiques élémentaires, ceux qui arrivent au sommet de la pyramide de Maslow et Raths : boire, manger et… se reposer ! Rappelons-nous que tous les élèves ne mangent pas à leur faim, par intention (régime), par désordre psychologique (anorexie), par manque de temps (mauvaise organisation), enfin par contrainte économique (pauvreté de la famille). D’autre part, on estime à 50% le nombre d’élèves qui manquent de sommeil !

Ensuite, les élèves recherchent la sécurité physique et psychologique. Ne pas avoir peur d’être agressé physiquement ou verbalement, éviter le danger, la gêne, l’erreur ou le mal. Cela implique de ne pas être humilié ni de se sentir coupable. Il est donc essentiel que l’élève se sente en confiance dans le local où il évolue, avec les personnes qu’il fréquente, avec les activités qu’il pratique.

De la même façon, l’école représente pour l’élève un espace social. Il a besoin d’appartenir à une collectivité, à un groupe ; il a besoin d’amour et d’affection, de partager avec autrui, de se sentir respecté, de se faire des amis et discuter.

Lorsque les besoins précédents sont remplis, l’élève peut passer à des besoins plus élaborés comme le besoin de réussite. Réussite à court terme dans les activités qu’il pratique à l’école, mais aussi à long terme dans ce que l’école va pouvoir lui apporter, c’est-à-dire comme moyen de se réaliser. A cet égard, il est judicieux de rappeler régulièrement que l’école est un moment où on apprend certes des disciplines académiques, mais où l’on découvre aussi le vivre ensemble.

Enfin, l’élève pourra rechercher le sens, comprendre et se comprendre. Il est alors indispensable de rappeler que toutes les disciplines sont importantes et liées, qu’elles répondent toutes à la question « qui sommes nous, que faisons-nous sur Terre ? », chacune à sa manière, avec ses propres exigences et sa propre méthodologie. Chaque enseignant pourra relier le cours qu’il dispense à une situation – réelle ou fictive – où l’élève en aura besoin pour résoudre un problème. Lorsque les liens sont démontrés, lorsque la finalité et la causalité sont affirmées, l’engagement de l’élève dans la tâche à accomplir se mobilise et s’entretient plus facilement.

Malheureusement les médias, les décideurs politiques et économiques comme l’opinion publique sont prisonniers de conceptions erronées sur l’apprentissage, attendent des objectifs à court terme et hiérarchisent les disciplines en fonction de leur supposée utilité sociale et économique. Au contraire, l’utilitarisme handicape la motivation intrinsèque quand de l’autre côté le professionnel de l’éducation sait que toutes les disciplines sont liées, elles se renforcent l’une l’autre. Par exemple, les arts plastiques permettent de développer les zones du cerveau qui gèrent l’espace, augmentent l’évocation visuelle (voir les cours sur la Gestion Mentale du présent site), ce qui à terme, impacte par exemple les performances en géométrie, géographie physique et la production d’énoncés descriptifs. Rien n’a d’utilité et d’intérêt en soi, il s’agit d’une interprétation personnelle liée à l’état de ses connaissances et l’appréciation du moment, aussi faut-il s’ouvrir à toutes les possibilités, entrevoir des connexions inédites ou singulières.

 

 

3. Les états émotionnels

 

On ne peut aborder les problématiques de la motivation sans parler des états émotionnels. En franchissant le seuil de l’école, l’élève est toujours lui-même, jamais un autre, aussi vient-il avec son bagage émotionnel qui le stimule ou l’handicape dans les études et ses relations à autrui.

Selon Antonio Damasio, le célèbre chercheur en neurosciences, spécialiste des émotions et auteur de « l’Erreur de Descartes », les états émotionnels se modifient. On passe d’un état à l’autre selon un cycle variable et résolument individuel. Mais cette transition ne se fait pas brutalement, aussi ne peut-on ordinairement passer de la tristesse à l’allégresse. Il existe au sein de l’un comme l’autre différentes strates que l’on franchit progressivement.

D’autre part, nous sommes sujets à des états émotionnels prééminents qui modèlent notre personnalité. Ainsi peut-on distinguer des personnes ordinairement optimistes, d’autres au naturel plutôt pessimiste. Les travaux de Carl Gustav Jung et de l’école de Palo Alto sont à cet égard particulièrement intéressants. Nous en parlerons davantage dans de futurs chapitres consacrés à l’état émotionnel, au profilage, à la personnalité et aux émotions.

Comment cet état émotionnel prééminent s’est-il construit ? D’après les neurosciences cognitives, la réponse tient à la fois de la communication entre clusters (réseaux, grappes) de neurones qui ont pris l’habitude de travailler ensemble aussi bien d’un processus biochimique. Le lecteur pourra se reporter aux cours introductifs sur le fonctionnement des neurones (dans Bases biologiques de l’apprentissage)sur le présent site neuropédagogie.com pour en apprendre davantage. L’état émotionnel prééminent est donc en partie le fruit d’une habitude, que l’on peut abandonner par un travail. La méthode Coué, les thérapies cognitives et la psychologie quantique sont à cet égard particulièrement efficaces.

Il convient alors de s’enquérir de l’état émotionnel de l’élève. De quelle façon ?

  • On peut observer la façon dont il entre en classe ou répond aux questions
  • On peut demander à chaque élève de placer sur un coin de table un smiley qui indique l’un des 3 états : négatif, neutre, positif.

Une fois la prise d’information effectuée, on peut tenter de modifier l’état émotionnel de l’élève par les moyens suivants, efficaces dans l’ensemble.

 

Le rituel

 

L’espèce humaine a dès son origine inventé et adopté différents rituels, avant même de se consacrer à des activités cognitives de dimension supérieure. Aujourd’hui encore nous nous livrons à de nombreux rituels qui ne sont même plus perçus comme tels. Le rituel, soit la reproduction de gestes et de mots selon un code intangible, offre une sécurité à l’individu et le libère du stress, mais permet également d’assurer au groupe une certaine harmonie. La neuropédagogie nous apprend que le rituel libère également des neurotransmetteurs du plaisir, en quantité nettement plus limitée que le sport ou l’activité intellectuelle bien entendu.

Quand pratiquer un rituel ? A chaque temps fort de la classe. On pense naturellement au début et à la fin du cours, mais aussi avant un devoir ou quand on fait venir un élève au tableau.

Peut-on changer de rituel ? Non. Quand on a choisi un rituel, il faut toujours employer le même pour chaque temps fort. Pour être plus clair, on peut employer un rituel A pour l’entrée en classe, et un rituel B pour la sortie.

Le rituel (qui fonctionne aussi bien dans les formations pour adultes) offre une transition formalisée entre un moment et un autre ; il permet de marquer la spécificité du temps de cours et s’adresse au cerveau reptilien. Il est donc tout à fait recommandé pour les apprenants en proie à un état émotionnel négatif. Quel genre de rituel adopter ? C’est à chaque enseignant de trouver son rituel, mais voici quelques idées :

  • demander aux élèves de serrer la main de leur partenaire ;
  • diffuser un court jingle (excellent avant de faire passer un élève au tableau);
  • commencer un cours en racontant quelque chose de positif ;
  • demander aux élèves de dire quelque chose de positif sur l’un de ses camarades ou de raconter un événement positif vécu récemment ;
  • faire un résumé oral de ce qui a été fait lors de la leçon précédente ;
  • En début de cours, raconter en 2-3 minutes une histoire extraordinaire et vraie en relation avec la matière enseignée ;
  • Inventer un slogan, un aphorisme. Dans ce cas, on peut en changer à la moitié de l’année.

 

Le mouvement

Le mouvement est particulièrement indiqué en cas de stress (voir les cours sur le stress sur le présent site neuropedagogie .com), mais aussi pour les élèves apathiques. Se lever ou marcher est fortement conseillé pour ces élèves.

 

Assurer un cadre harmonieux

 

Les élèves (et apprenants adultes) ne vivent malheureusement pas tous dans un cadre harmonieux, et ne trouvent guère de compensation dans l’austérité d’une salle de classe ou de formation. Pourtant des études très sérieuses ont prouvé l’impact positif du cadre de travail sur l’état émotionnel, dont il participe à modifier. Nous invitons le lecteur à se reporter au cours « organiser son espace pour mieux apprendre ».

Un cadre harmonieux signifie aussi un cadre sans menace, humiliation, culpabilisation, stress. Mais un cadre où les encouragements et les félicitations sont nombreux.

 

La musique, la relaxation et les techniques de respiration

 

La musique instrumentale, la relaxation et les techniques de respiration n’ont pas franchi le seuil de la classe (mais celui de certains cabinets médicaux et salles d’opération), pourtant leur rôle positif sur l’humeur est de plus en plus affirmé. Musique, relaxation et techniques de respiration ont sans le moindre doute la capacité à modifier un état émotionnel, cela a été prouvé par des études expérimentales.

Effectivement, les musiques précitées permettent de détendre l’individu. Dans cet état, les ondes Alpha (8 à 12 cycles par seconde) mesurées par les électro-encéphalogrammes prédominent. Sont alors légèrement favorisés l’encodage, l’assimilation et la mémorisation des informations ; surtout, l’angoisse et le stress disparaissent progressivement. Relaxation et techniques de respiration provoquent des effets identiques.

 

Introduire le choix et la nouveauté

 

Le choix est bien une chose dont les élèves sont dépourvus ; il permet pourtant de libérer de l’angoisse et du stress, de changer l’état émotionnel et provoquer ou entretenir la motivation.

Encore une fois, laisser le choix ne signifie pas donner le pouvoir aux élèves, mais proposer différentes activités parmi lesquelles un choix peut s’opérer. Cela plaira particulièrement aux élèves autonomes.

L’introduction d’une nouveauté peut également participer à la modification de l’état émotionnel pour son côté intrigant.

 

Enseigner à gérer ses émotions

 

Gérer ses émotions s’apprend et s’enseigne, pas seulement auprès d’un thérapeute ou d’un praticien, mais aussi lors de cours de théâtre ou de jeux de rôle. Ces derniers peuvent facilement se pratiquer en classe. Il en ressort davantage d’harmonie.

 

La parole

 

L’emploi de la parole est fondamental chez l’être humain, et son utilité pour changer un état émotionnel reconnue. Consacrer un temps de libre parole lorsque de nombreux élèves sont en proie à un état émotionnel négatif peut avoir une influence positive sur le présent cours, mais surtout sur les cours suivants. La parole est une façon de concrétiser un sentiment – immatériel par nature -, donc de lui donner corps et l’expulser ensuite.

 

 

4. L’emploi du jeu

 

Certains élèves sont en opposition systématique, aussi les jeux peuvent-ils les conduire à se motiver davantage pour apprendre en endossant le rôle de médiateur. Quand on pense au jeu, on pense au jeu de société, mais c’est oublier tous les jeux narratifs, les énigmes et concours, etc.

Nous avons adopté avec succès le jeu dans nos pratiques et constaté son efficacité chez les élèves les plus récalcitrants, surtout si ces derniers participent à son élaboration.

Nous avons par exemple invité des élèves particulièrement faibles et peu inspirés par les cours à ouvrir leurs livres afin d’en extraire des informations à transformer sous forme de questions à leurs camarades, à l’image du jeu télévisé « Questions pour un champion », en changeant toutefois certaines règles afin de constituer des groupes.

Nous signalons ici un excellent livre de Bruno Hourst et Sivasailan Thiagarajan qui ont extrait de différents jeux leurs règles afin de pouvoir les adapter aux pratiques de la formation :

  • Bruno Hourst et Sivasailan Thiagarajan : Modèles de jeux de formation. Les jeux-cadres de Thiagi

 

 

5. L’emploi du feed-back et de la bonne cause attributive

 

L’enseignement et la formation laissent trop peu de place au feed-back qui est pourtant essentiel pour progresser. Les apprenants (élèves, étudiants et adultes en formation) ont trop peu de retour sur ce qu’ils ont fait. Une copie avec une petite annotation est insuffisante, surtout si elle n’est pas corrigée et rendue dans les 48 heures, temps pour que l’élève se sente encore concerné par ce qu’il a produit. Au-delà, sa mémoire n’aura pas retenu la manière dont il a réalisé sa copie, les stratégies cognitives qu’il a employées.

Le feed-back (au rang duquel on place le traitement de l’erreur) offre donc une formidable opportunité pour développer et entretenir la motivation. C’est également le cas de la bonne cause attributive.

Nous avons effectivement observé dans le premier cours sur la motivation que le fait d’attribuer le succès ou l’échec d’un acte à telle ou telle cause (ou personne) est essentiel pour les théories de la motivation, que cela relève de l’intime. Ainsi, face à un même échec, certains vont en attribuer la cause à la malchance, d’autres au manque de travail, les derniers à l’absence d’habileté.

Or il est difficile pour les enseignants et formateurs, qui sont d’anciens excellents étudiants, d’imaginer que l’on puisse attribuer un échec à d’autres causes que l’absence d’effort ou de capacité.

Aussi Foersterling (in Psychological bulletin – 1985), puis Perry et Penner (in Journal of Educational Psychology, n°82) suggèrent-ils qu’il faut enseigner aux élèves, étudiants et adultes en formation les bonnes attributions aux causes qui ont conduit à l’échec. Bref, prouver comme Antoine de la Garanderie que l’échec est moins lié au manque d’aptitude que d’habitude. Tout cela relève aussi du feed-back.

Les formations, quel que soit le public, seraient plus performantes et engageantes si on accordait au feed-back la place qu’elle mérite.

 

 

6. Le contrôle de soi et de son environnement

 

L’emploi du feed-back offre aux enseignants et formateurs, mais aussi aux managers (tout manager ne doit-il pas être avant tout un enseignant ?) la possibilité de conduire l’apprenant à améliorer le contrôle de soi et de son environnement.

Pour ce faire, l’enseignant ou le formateur aura tout intérêt à proposer des guides et méthodologies clairs et détaillés sur :

  • l’emploi des ressources à mobiliser (savoir, matériel, etc.) pour réussir l’activité ;
  • la finalité de l’activité, en n’oubliant pas de la relier à des situations concrètes comme à d’autres disciplines;
  • la démarche à employer (inductive, déductive, chronologique, etc.)

Avoir le sentiment de pouvoir contrôler son environnement comme soi-même ne relève pas de l’inné mais de l’acquis.

Il faut donc enseigner explicitement aux élèves qu’il existe une corrélation entre leur comportement et les effets qu’il induit.

Lorsqu’on voit peu de corrélation, on est invariablement confronté à l’anxiété et la passivité et on connaît alors un succès moindre.

Introduire des éléments de neuropédagogie dans différentes disciplines, rappeler que nous pouvons tous progresser parce que notre cerveau est adapté, conduit à renforcer la corrélation entre le comportement individuel et l’effet sur l’environnement.

Selon l’éminent psychologue Skinner, croire que l’on a de l’emprise sur soi et son environnement repose sur 3 facteurs :

  • croire en ses capacités ;
  • croire qu’il existe un lien entre sa volonté et le succès ;
  • croire qu’il existe une méthode pour réussir, une stratégie à adopter, des moyens spécifiques à développer pour réaliser une fin.

D’où l’importance cruciale de développer considérablement la méthodologie !

 

 

7. La confiance en soi

 

Du sentiment de pouvoir contrôler sa personne et son environnement, c’est-à-dire d’établir explicitement des corrélations entre un comportement individuel et le résultat qu’il induit, découle la confiance en son efficacité.

Malheureusement, cette confiance est limitée à certains domaines et en exclut d’autres, soit parce qu’on a fait l’expérience de l’échec, soit parce qu’on nous a renvoyé une image négative, soit parce qu’on accorde du crédit à certaines croyances populaires comme l’impossibilité d’être bon en maths et en français. Fort heureusement, si un ordinateur est multitâche, le cerveau aussi. Il n’est nullement inscrit dans aucune constitution, dans aucun gène ni dans aucun neurone qu’on ne peut pas exceller en maths comme en français, d’autant plus que les premiers sont un langage !

Il a donc été prouvé que les élèves qui ont confiance en eux mettent en place intuitivement de meilleures stratégies de réussite et pratiquent davantage la métacognition que les autres. La métacognition est ici l’introspection sur sa façon d’apprendre et la projection dans le futur. Cela est lié au développement du cortex préfrontal.

Le fait de pouvoir choisir une activité augmente mécaniquement la confiance en soi et la motivation.

 

 

8. Se fixer des objectifs

 

Se fixer des objectifs : voilà encore une pratique qui initie et développe la motivation, encore faut-il que lesdits objectifs soient clairs, réalisables et limités dans le temps. Mais en raison du long processus de maturation du cerveau humain, un enfant ou un adolescent y parvient difficilement. D’autre part, en l’absence d’objectifs précis, le projet d’adultes qui se livrent à l’autoformation risque de se perdre dans la procrastination.

La difficulté majeure lorsqu’on se fixe un objectif est la finalité de celui-ci. Faire quelque chose, oui, mais pour quoi ? Il faut en effet distinguer les finalités conscientes qui sont facilement accessibles des finalités inconscientes qui le sont beaucoup moins.

Nous avons par exemple reçu une adolescente qui comme beaucoup de ses camarades rêvait de devenir riche et célèbre et se promettait à l’école dramatique, donnant moult détails sur les motifs de cet engagement, appuyés par une argumentation solide éprouvée au contact de ses parents. Au cours de cet entretien, nous avons tous deux convenus que son envie de célébrité relevait d’un manque de reconnaissance de ses proches quand son désir de fortune se rapprochait plutôt d’un train de vie d’un cadre supérieur. La jeune fille décida donc de se présenter au concours d’une école de commerce où elle fut reçue.

Nous renvoyons le lecteur qui souhaite approfondir les problématiques des objectifs conscients et inconscients aux théories psychodynamiques de Zukier.

Lorsqu’on se fixe un objectif qui constitue un motif pour agir, il convient donc de répondre explicitement aux questions suivantes :

  • Pourquoi (qu’est-ce qui me motive ; ce qui est en amont) je veux faire ceci ou cela ?
  • Pour quoi (pour quelle fin ; ce qui est en aval) je veux faire ceci ou cela ?
  • Quelle importance (affective, réalisation de soi, plaisir…) cela a-t-il ?
  • Quelle utilité cela a-t-il ?
  • Combien de temps je me donne pour finir la tâche ? Se donner alors 3 limites temporelles (basse, moyenne, haute) pour ne pas se démotiver si l’une d’entre elles est échue.

Le fait que des étudiants se fixent des objectifs pour maîtriser quelque chose participe de 10 à 30% pour leur succès.

Les objectifs conscients fixés (et la différence avec les objectifs inconscients si possible établie) se pose la valeur accordée à la réussite dans la maîtrise d’une compétence, qui varie d’un individu à l’autre.

Ainsi peut-on se demander si lorsque j’accomplis une tâche, l’important est de bien faire ou seulement de participer à l’action ; si je me réjouis avant, pendant ou après avoir réalisé la tâche.

Les théories sur la motivation distinguent traditionnellement trois composants dans la valeur de la tâche :

  • la perception de l’importance de la tâche ;
  • l’intérêt personnel à réaliser la tâche ;
  • la perception de l’utilité de la tâche pour des objectifs plus lointains.

 

 

9. L’autodétermination

 

La théorie sur l’autodétermination (en anglais : self-determination theory) nous vient d’Edward Deci et Richard Ryan. C’est le fait de s’engager avec passion dans une tâche, et cela survient lorsqu’on la trouve particulièrement importante, intéressante, régénératrice. On peut se reporter au site de l’université de Rochester pour obtenir de plus amples détails.

Si l’enseignant ou le formateur parvient à conduire l’apprenant à faire sienne la tâche à accomplir, il peut alors éveiller une grande motivation. De quelle façon ?

  • En lui laissant le choix parmi des options prédéterminées ;
  • En soulignant l’importance et l’intérêt de la tâche pour des projets personnels ou la construction de soi ;
  • En présentant la tâche de manière accrocheuse.

 

 

10. La motivation la plus forte vient de la compréhension

 

Mais la motivation la plus forte (plus que la récompense ou la reconnaissance) vient de la compréhension, lorsqu’on s’écrie « Eurêka, j’ai trouvé ! ».

Le cerveau a alors fait les connexions idoines et perçoit les raisons de la tâche, à défaut du sens qui est l’étape ultime de la cognition.

Quand on a compris, on est sujet à une augmentation de la production de dopamine et divers opiacées naturelles qui nous mettent dans un état de bien être, voire d’extase. Le cerveau cherchera à retrouver cet état. Ce jet de dopamine et d’opiacées est la récompense du cerveau.

Voilà pourquoi l’enseignant ou le formateur qui propose une tâche difficile, mais donne les moyens de la réaliser et accompagne discrètement les plus faibles sur les chemins de la réussite, pourra susciter et entretenir la motivation sans avoir recours à la récompense ni à la punition.

 

 

11. La compétition

 

On peut être tenté d’introduire la compétition entre individus ou entre groupe d’individus, pensant que cela peut susciter et développer la motivation. Enoncer les notes à voix haute ou classer les élèves relève déjà de ce domaine.

La compétition peut effectivement avoir un effet positif chez certains individus, mais complètement démotiver d’autres.

Par ailleurs, les apprenants (élèves, étudiants ou adultes en formation) qui souhaitent être meilleurs que leurs camarades sont plus facilement sujets aux émotions négatives, à l’anxiété et peuvent adopter un comportement irrationnel. Leur attention sera davantage portée sur l’autre que sur eux-mêmes.

En revanche, un apprenant qui essaie d’améliorer ses résultats pour lui-même, en faisant abstraction des autres, conservera la confiance en lui lors de la rencontre d’un échec. Ce sera beaucoup moins le cas du compétiteur.

 

 

12. La récompense

 

Faut-il récompenser les élèves ? Nous avons vu dans le présent cours aussi bien que dans le précédent que le cerveau fabriquait sa propre récompense chimique.

Cependant, s’il est formellement et définitivement déconseillé de récompenser un élève avec de l’argent (contrairement à l’expérience initiée par un économiste dans un établissement difficile pour s’assurer l’assiduité des élèves) ou avec un bien à valeur marchande, en revanche, d’autres formes de récompense peuvent convenir :

  • pause ;
  • reconnaissance ;
  • jeux ;
  • etc.

Toutefois, il est bon de savoir que le cerveau apprend pour prédire (comme on réfléchit pour abolir la réflexion), aussi enregistrera-t-il les conditions de la récompense pour en attendre une autre dans le futur. Selon Berridge et Robinson, la dopamine sera alors libérée sous la prédiction de la récompense, ce qui augmentera la performance et la motivation de l’individu à court terme. Mais selon Koob et LeMoal, le cerveau s’habitue vite à la récompense, aussi cherchera-t-il une dose de dopamine et autres opiacées naturelles plus élevée via une récompense…plus élevée ! Enfin, même collective, la récompense doit être individualisée.

Si on a mis en place un système de récompense et qu’on souhaite y mettre fin, il faut le faire graduellement au risque que les apprenants prennent cela comme une punition.

 

 

13. Notes

 

On ne peut terminer ce cours sur la motivation sans parler du Self-Regulated Learning (SRL) de Pintrich (pour l’autoformation) ni sur la distinction entre le fait d’être motivé par la fin ou par les moyens en Gestion Mentale. Mais nous traiterons ces aspects dans les onglets qui leur sont appropriés (autoformation d’une part, Gestion Mentale d’autre part) et prions le lecteur de s’y reporter en temps voulu. Un lien hypertexte sera alors implémenté dans ce document pour le renvoyer à la bonne adresse.

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

Cette petite bibliographie indicative ne reflète pas la complexité des problématiques de la motivation, et nous la mettrons à jour lorsque le temps nous le permettra. Elle offre cependant suffisamment de points de départ.

 

1. Ouvrages de base

Collectif : Concise Learning and Memory, chap.23 et 24
Collectif : Encyclopedia Of Educational Psychology
Collectif : Handbook of Psychology, vol. 07

 

2. Revues :

Journal of Educational Psychology
Journal of Research in Science Teaching
American Psychologist
British Journal of Educational Psychology
Research on motivation in education

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